Eight Days a Week The Touring Years a été la publication la plus importante pour les fans des Beatles, en 2016.
Maccaclub a été l’un des partenaires de cet évènement et retrace dans ce dossier toutes les informations concernant ce documentaire exceptionnel et une interview de Giles Martin et Jonathan Clyde.
En 1966, The Beatles est un phénomène qui dépasse les frontières de la musique. Albums cassant les codes, hits définissant la Pop au sens noble du terme ; le groupe originaire de Liverpool accompagné par des personnages aussi incontournables que Brian Epstein ou Mal Evans est en train de secouer le monde qui est alors aussi en plein chamboulement. Des tournées s’organisent toujours plus loin, toujours plus fréquentes et réunissant toujours plus de fans hommes et filles de tous âges. Ces dernières ayant un lien particulier avec l’Histoire du groupe sur scène tant les concerts des Beatles sont souvent difficile à gérer : brouhaha assourdissant, moyens techniques à la peine pour couvrir les cris des gens et villes dépassées par des événements alors ingérables. Comment ces quatre garçons ont-ils pu garder les talons de leurs boots sur la terre ferme et la tête froide sans être engloutis par un trop-plein de folie devenu incontrôlable ? A l’été 1966, le 29 août pour être précis dans le mythique Candlestick Park de San Francisco et après être descendus de la scène ; le groupe est unanime : « Cela ne peut plus durer ».
C’est cette intense aventure de presque 5 ans que le réalisateur Ron Howard a voulu présenter à tous les publics sous la mention : « The band you know, the story you don’t ». (Littéralement : « Le groupe que vous connaissez, l’histoire que vous ne connaissez pas »). La promesse est à la hauteur de ce quartet sur lequel tout ou presque tout a été, est et sera dit. Car s’attaquer aux Beatles en concert est un long travail fait de recherches et de milliers d’heures de visionnages entre documents vidéo, sonores et photographiques de plus ou moins bonne qualité…
Techniquement, il faut souligner le travail assez formidable réalisé par l’équipe du film pour restaurer certains documents. Monté avec un rythme assez frénétique mais ne noyant pas trop le spectateur dans un catalogue d’informations ; le film alterne entre extraits de concerts, de vidéos intimistes où l’on voit les Beatles tenter de se reposer dans des chambres d’hôtels malgré la présence parfois dérangeante de journalistes et de versions studios ou live en fond sonore de leurs chansons… Des intervenants de choix viennent parler de leurs propres expériences de fans tels que Elvis Costello ou bien Whoopi Goldberg qui narre gaiement et avec une belle pointe de sympathie son rapport au groupe à leurs concerts. John Lennon, George Harrison, Paul McCartney et Ringo Starr sont présents soit à travers des images d’archives pour les deux premiers soit en bonne et due forme pour commenter les images avec tout le charme qu’on leur connaît ; Paul rappelant que les Beatles « était un bon groupe de musique ». Toujours fascinant à entendre. La société Apple Corps étant un des principaux partenaires du film ; leur présence est donc justifiée. Outre l’origine donc officielle des archives et des morceaux diffusés à l’écran, nous notons la présence de Giles Martin à la baguette pour l’aspect musical. Avec un son qui fait plaisir à entendre – les cris des fans ayant été assez remarquablement diminués, Ndlr – et une image remastérisée de façon plus ou moins nette ; nous pouvons dire que l’ensemble est très réussi ; comme souvent avec Ron Howard…
Alors qu’en est-il concernant le contenu ? A vrai dire, il est vraiment riche… D’une part les documents photographiques qui parsèment le documentaire apportent parfois leurs lots de belles émotions. Photos du groupe en vacances tirées d’archives personnelles, photos sur scène, en coulisses… Le film est truffé de ces clichés plus ou moins célèbres des Fab Four. Certains documents inédits venant compléter le tableau nous ont positivement surpris. Outre les photos, on trouve un grand nombre d’extraits d’interviews. Ce qui frappe dans cette compilation c’est la mise en avant du réalisme et du sang-froid qu’affichait le groupe. Des caractères qui ressortent fortement grâce aux traits d’humour des membres de ce dernier. Ils avaient cet humour très laconique qui était tout sauf provocation. Le film est donc rempli d’interventions assez comiques issues des différentes conférences de presse auxquelles le groupe a participé. On retrouve John Lennon dans ces grandes heures à la fois provocateur et naturel se faisant passer pour un certain « Eric » devant les questions d’un journaliste quelque peu mal renseigné sur le groupe ou bien répondant que les fans des Beatles crient dans les tribunes des endroits où ils se produisent en comparant leur réaction à celle d’un public qui exulterait lorsque leur équipe de football favorite marque un but… D’autres « séquences de vie » valent leur pesant d’or dans ce sens. Sans pour autant en dévoiler plus, nous retrouvons le côté blagueur des membres du groupe à de nombreux moments. Mais ce qui est surtout très beau et c’est aussi l’avis de plusieurs intervenants, c’est cette cohésion et cette fraternité. Souvent, les récits racontés dans le film mettent l’accent sur la capacité pour les membres du groupe à veiller les uns sur les autres. C’est un fil conducteur que nous avons beaucoup apprécié. Nous sommes en droit de le penser ; sans décisions démocratiques et collégiales pendant les tournées ; les Beatles n’auraient peut-être pas eu la longévité qu’ils ont eue. C’est évident certes, mais ce film tend à démontrer une forme de pacifisme assez général au milieu de la tempête médiatique qu’ils ont traversée. A coup de numéros 1, de singles, de compositions et de journées durant lesquelles ils faisaient parfois une séance d’enregistrement, une séance photos, une conférence de presse et un concert le soir ; le rythme de vie des Beatles en tournée devenait très compliqué à gérer. D’où « Help ! » et son refrain qui déjà à sa sortie en 1965 tirait la sonnette d’alarme.
D’autre part, nous retrouvons de nombreux extraits de concerts devant lesquels nous sommes restés parfois un peu dubitatifs. Précisons que c’est plus le manquement technique qui fait défaut tant les instants où les Fab Four se produisaient étaient mémorables. Au final, cela ne nous a pas retiré le plaisir. D’abord pour des raisons purement musicales : les spectateurs présents à leurs concerts et même s’ils n’en n’avaient pas toujours la possibilité étaient là, à découvrir ou réentendre des morceaux parmi lesquels sont restés des chansons d’une puissance mélodique encore inégalée aujourd’hui. Ensuite parce que le groupe réussissait dans une immense cacophonie et avec de tous petits amplificateurs à jouer ensemble sans que l’on puisse déceler de coquilles. Imaginez la performance que de placer « Baby’s In Black » et ses harmonies vocales en live devant un parterre de 5000 personnes venues crier leur amour pour le groupe… Il fallait le faire… Enfin parce qu’il est terriblement intéressant de s’imaginer ce que déplaçait le phénomène à son apogée sur scène. Des salles remplies avec parfois 10 fois plus de personnes à l’extérieur qu’à l’intérieur de la salle voulant elles aussi avoir leur place dans les gradins forment un exemple probant. Le film propose aussi une flopée vertigineuse de filles pour la plupart ; des adolescentes (parfois des garçons) dans des états extrêmes de joie mêlée de pleurs. Les malaises étaient courants pour ces jeunes face à la puissance de ce qu’elles voyaient. C’est un aspect explicitement restitué dans ce film d’une société qui, à l’époque ; n’avait pas été vraiment préparée à de telles émotions avec par exemples des plans sur des policiers portant des fans épuisés ou évanouies dans les travées des salles de concerts. Aussi, nous avons fortement apprécié la précision des informations, ainsi que la belle qualité de récit de ces aventures. Il fallait trouver un juste milieu entre les séquences pour séduire le fan acharné et l’amateur qui vient tenter de comprendre le phénomène musical. Evidemment, Ron Howard a trouvé la clé. Pas surprenant venant de cinéaste aux multiples talents. Les aficionados les plus fadas du groupe trouverons toujours cependant quelques manquements comme toujours comme par exemple le fait qu’il manque parfois quelques images de la très belle tournée européenne de 1966 (les concerts de Munich étant parmi les concerts références du groupe…).
Près de deux heures donc pour finalement résumer l’idée suivante : décrire les raisons qui ont poussé le groupe à arrêter les concerts. Partir depuis Hambourg jusqu’aux Etats-Unis en passant par les Philippines, le Danemark ou bien le mythique Cavern Club… Sans compter les passages au Ed Sullivan Show qui rassemblèrent des audiences télévisées record pour l’époque ou bien encore Une somme de dates énorme donc… La deuxième tournée américaine rappelons-le se composant de 15 shows en 30 jours (sans compter les passages télévisés, etc.). Un tour de force. Il fallait être complet. Là encore, Ron Howard et l’équipe du film marquent l’essai. Point d’orgue du film, la diffusion en guise de bonus exclusif ; du concert du Shea Stadium datant du 15 août 1965 (avec un extrait bien agressif durant le film rappelant la catastrophe sonore que cela avait été…). Notons encore l’aspect pionnier de ce genre de show qui d’un coup venait d’ouvrir la voie aux concerts de Rock dans les stades. Le tout est une fois de plus très bien ficelé avec pour l’occasion une restauration en 4K pour l’image avec un son plus qu’au rendez-vous. Les cris des fans ayant été bien évidemment diminués là-aussi pour le confort d’écoute. Un bien beau document qui malgré l’absence logique de commentaires – le concert ayant été restitué ainsi dans son déroulement initial, Ndlr -. La performance assez folle ce soir-là de John Lennon à l’orgue valant le détour à elle seule… Après quelques nouveaux extraits fondamentaux montrant le ras-le-bol progressif de cette atmosphère tendue et presque dangereuse dans laquelle les Beatles évoluaient, le film se termine assez promptement ensuite sur l’année 66 et les dernières dates de la tournée américaine… Enfin, vous connaissez tous la suite.
En somme, The Beatles: Eight Days a Week – The Touring Years est un film assez formidable car il permet aux amateurs du groupe de se faire une idée assez réelle du monde dans lequel se développait l’entité The Beatles et la prise de conscience que ce groupe aurait forcément une empreinte sur les générations à venir musicalement comme socialement. Le film porté par de nombreuses coopérations prestigieuses qu’il s’agisse des intervenants ou des institutions liés au projet (Imagine, White Horse Pictures, Paul Crowder ou Nigel Sinclair) est un très bel album de souvenirs finalement peu négatifs tellement la musique suffit à garder le sourire et se rappeler pourquoi nous aimons tant ces quatre-là. Il est certain que beaucoup d’entre vous se reconnaîtront peut-être parmi les spectateurs en délire. Si vous aviez l’âge d’en être ; il est probable que vous ayez un très beau rôle de figurant dans ce documentaire. Alors, chaussez vos bottes, coiffez-vous correctement et courrez-y. « Ladies & Gentlemen, here they are : The Beatles » !
Interview de Giles Martin et Jonathan Clyde
Début octobre 2016, une projection privée étaient organisée à l’Olympia pour les salariés de Vivendi Universal et leurs invités. Giles Martin qui a restauré les prises live des extraits figurant dans le documentaire réalisé par Ron Howard « The Beatles : Eight Days a Week », était à Paris, avec Jonathan Clyde, producteur exécutif pour Apple Corps, pour présenter le film. Dans les coulisses, nous avons pu croiser Barbara Bach, épouse de Ringo Starr, accompagnée de sa sœur Marjorie (Mme Joe Walsh), ainsi qu’Olivia Harrison. De son père, George Martin, décédé en mars 2016, Giles a hérité de l’élégance, la courtoisie et des techniques de production très pointue. Rencontre dans une loge du célèbre music-hall parisien. Peut-être bien celle utilisée par Paul McCartney pour son mémorable concert du 22 octobre 2007.
Qui a eu l’idée de produire le film « Eight Days a Week » ?
Jonathan Clyde : Un archiviste de Washington nous a contactés vers 2002. Il recherchait tous les films réalisés pendant les tournées américaines des Beatles. Ça nous a semblé une bonne idée de réaliser un film consacré à cette période. Malheureusement, Giles Martin était très occupé avec son travail sur l’album « Love » pour le spectacle du Cirque du Soleil, puis pour d’autres projets. Il s’est passé plusieurs années avant qu’il puisse se pencher sur les bandes de concerts. Mais il y a toujours un temps pour tout.
Giles Martin : Nous avons essayé de récupérer tout le matériel nécessaire. Par les fans eux-mêmes, par les frères Maysles qui avaient réalisé le documentaire sur la première visite des Beatles en Amérique et par des collectionneurs. C’était un processus très intéressant et un sacré challenge car la source sonore semble sortir d’un dictaphone. Les Beatles étaient un groupe de stade avant que ce concept soit inventé. Ils arrivaient avec leurs instruments et leurs amplis alors que maintenant, Paul McCartney utilise dix-huit camions pour son matériel. Le souci était d’obtenir un son acceptable aujourd’hui avec des bandes vieilles de cinquante ans.
Etes-vous satisfait du résultat sur les bandes son ?
G.M : Je pense que ce qu’on entend maintenant est bien meilleur que ce que le public percevait à l’époque pendant les shows.
Comment le son était-il enregistré à l’époque ?
G.M : Sur la table de mixage de l’époque, avec un trois pistes pour le Hollywood Bowl ou avec des magnétophones pour les autres concerts.
Et comment s’est passé le travail sur les images ?
G.M : Il y a des images filmées par les spectateurs eux-mêmes. Un canadien nous a contacté car il avait un film du show de Toronto et nous a affirmé qu’il était formidable. Il est venu à Abbey Road, mais après quelques secondes, nous avons su que ce serait inutilisable. C’est très important de rechercher la qualité car nous travaillons pour les fans qui n’ont pas eu la chance de voir les Beatles. Ce n’est pas un travail archéologique.
Votre père, Paul McCartney et Ringo Starr ont approuvé la production ?
G.M : Mon père, malheureusement non, car il décédé en mars 2016 et le projet n’a été finalisé qu’en juin. Ça a été bizarre car j’ai pris une semaine après ses obsèques avant de revenir à Abbey Road, où mon père et ma mère travaillait et se sont rencontrés. Et entendre la voix de mon père sur les bandes de studio… Je ne savais pas que le film serait dédié à mon père. Je ne l’ai vu qu’à la première projection.
Mais Paul, Ringo, Yoko et Olivia Harrison ont suivi l’avancé du travail. C’était leur projet également.
J.C : Ils ont également apporté leurs propres archives photographiques.
Quelle sera la prochaine production Beatles ?
J.C : Ce sera « Let It Be ».
Encore beaucoup de travail avec plus de soixante-dix heures d’images filmées et autant de musique.
J.C : Oui, c’est énorme, mais très excitant.
GM : Il y a une très forte demande au sujet des Beatles. Ce qui est très confortable, c’est de pouvoir faire les choses tranquillement et bien. Nous avons le temps car les Beatles ne vont pas partir en tournée demain.
Propos recueillis par Dominique Grandfils
Contenu des DVD publiés le 22 novembre 2016 :
Au menu donc, le film sera disponible en 4 éditions :
- Une édition simple DVD accompagnée d’un livret de 12 pages au prix de 19,99€,
- Une édition simple Blu-ray Disc accompagnée d’un livret de 12 pages au prix de 24,99€,
- Une édition deluxe contenant 2 DVD accompagnée d’un beau livre exclusif de 64 pages au prix de 29,99€,
- Une édition deluxe contenant 2 Blu-ray Disc accompagnée d’un beau livre exclusif de 64 pages au prix de 34,99€.
A noter que Ron Howard a écrit l’introduction du livret pour toutes les éditions. Pour ce qui est des éditions deluxe, les textes ont été rédigés par Jon Savage – journaliste britannique spécialisé dans le Rock et dont ouvrages sont de très bonne qualité. Il est notamment connu pour sa biographie très complète des Sex Pistols.
Outre le film dont la durée avoisine 2 heures, les éditions deluxe proposeront un contenu additionnel rempli de belles surprises.
Un mini-documentaire intitulé « Paroles & Musique » dans lequel John, Paul, George et Ringo livrent leurs anecdotes concernant l’écriture de leurs chansons, et l’influence de la musique écoutée par leurs parents. Le travail d’écriture de Lennon et McCartney pour d’autres artistes est abordé, ainsi que l’univers musical de chacun des membres de The Beatles. Avec également Howard Goodall, Peter Asher, Simon Schama et Elvis Costello.
Un second mini-film intitulé « Premiers Signes D’Une Autre Direction ». Ce documentaire sur les Beatles, l’importance de l’humour dans leurs vies, le rôle joué par les femmes dans leur existence, leurs influences et leur univers musical met en avant l’Histoire du groupe telle que nous ne la connaissons pas ou peu. Avec John, Paul, George et Ringo, accompagnés de Paul Greengrass, Stephen Stark, Peter Asher, Malcolm Gladwell, Sigourney Weaver, Whoopi Goldberg, Richard Curtis, Elvis Costello et Simon Schama. Un casting haut en couleur pour décrire ce groupe qui a définitivement marqué son époque et continue de nous fasciner encore aujourd’hui.
L’ensemble ne serait pas complet sans quelques extras issus des concerts des Fab Four… Le tout ayant été remastérisé avec fidélité. Nous retrouvons les performances complètes de :
. « She Loves You » – ABC Theatre, Manchester 1963,
- « Twist And Shout » – ABC Theatre, Manchester 1963,
- « Can’t Buy Me Love » – NME Awards, Londres 1964,
- « You Can’t Do That » – Melbourne 1964,
- « Help! » – ABC Theatre, Blackpool 1965.
Enfin, et pour aller plus loin les bonus proposeront aux novices comme aux fans de la première heure de mieux comprendre l’univers Beatles à travers des séquences sur Liverpool, l’intervention de trois fans ou bien encore des souvenirs de leurs passages en Australie et au Japon ainsi que l’évocation du tournage du film « A Hard Day’s Night » avec une halte par le Shea Stadium de New York City à l’été 1965, considéré comme l’ouverture de la voie aux concerts de Rock dans des stades…
Une version alternative du début du film sera également glissée dans l’ensemble amenant le total à plus d’une heure trois-quart de musique en plus.
Dossier préparé par Carl Kieser et Dominique Grandfils