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11 janvier 2014
OfflineBILLBOARD – Février 2012 - traduction
« Allô, c’est Paul à l’appareil. Vous attendiez mon coup de fil ? »
« Eh bien oui, en effet ; Merci, Sir Paul »
Sir Paul McCartney appelle d’ « une voiture » quelque part en Angleterre, et est là pour discuter de son nouvel album, Kisses on the bottom. Dans cet album, McCartney rend un hommage tout en douceur à une époque musicale passée, ainsi qu’à de tendres souvenirs des chansons de son enfance.
Ou, plus précisément, et comme le Macca dit lui-même, Kisses (ce titre est une référence à un vers du 1er morceau de l’album, I’m gonna sit right down and write myself a letter) n’est que « mélodie et souvenir ». Non seulement il contient bon nombre de standards – certains très connus, d’autres beaucoup moins – mais aussi deux nouvelles compositions de McCartney qui se fondent à merveille dans cette collection élégante en terme de belles mélodies et de chant.
L’album est produit par le légendaire producteur Tommy LiPuma, qui a déjà reçu plusieurs Grammy Awards (et qui a travaillé avec Barbra Streisand, Miles Davis, Diana Krall... ) et l’on y entend la pianiste jazz/pop Diana Krall et les musiciens qui l’accompagnent en studio et sur la route – Kisses peut passer, à première vue, pour un petit album tranquille, surtout comparé à des morceaux de légende de McCartney. Et pourtant, ce disque ne manque pas de substance, d’élégance et de sophistication. C’est le genre d’album qui s’écoute, espère McCartney, pour se détendre après une dure journée.
« Quand je l’écoute… quelque chose d’agréable se produit », dit-il « je me retrouve dans un endroit où j’aime aller. J’imagine les gens qui rentrent chez eux, ouvrent une bouteille de vin ou de ce qu’ils aiment boire, mettent l’album, s’assoient confortablement et se détendent. J’espère que les gens le trouveront mélodieux, apaisant et qu’ils y trouveront quelque chose qui leur « parlera ».
En cette période où réinterpréter les standards est devenu un standard (on se souvient des cinq albums de Rod Stewart), l’incursion de McCartney dans le répertoire de ces classiques se distingue des autres par son côté chaleureux et spontané, par cette sélection impeccable de chansons, sélection qui sort des entiers battus, et par le fait que le bassiste le plus célèbre du monde n’y joue aucune note, à part quelques sifflements spontanés sur My very good friend the milkman. Cet album, peut-être plus que tout autre, met en vedette McCartney le chanteur.
« En un sens, c’était très agréable de ne jouer d'aucun instrument. Je n’étais là qu’en tant que chanteur », dit-il « je pouvais tout simplement leur laisser la responsabilité de jouer, m’asseoir et apprécier la musique. De cette manière, j’ai pu me concentrer entièrement sur le chant. »
Un an avant le début de l’enregistrement, LiPuma a passé cinq jours dans le studio de McCartney installé dans sa maison de l’East Sussex, avec un stock de chansons et accompagné d’un « clavier très talentueux » pour faire des essais. « On a enregistré environ 15 ou 20 chansons, piano et voix uniquement, pour se rendre compte de ce qui pouvait marcher ». dit LiPuma. « Je suis reparti avec une idée assez précise des morceaux avec lesquels il était à l’aise, et ceux avec lesquels il l’était moins. »
Les chansons enregistrées ont été choisies de manière démocratique – certaines dataient de l’enfance de McCartney, qu’il passa autour du piano familial joué par son père, musicien amateur : « Je me suis souvenu de certaines [chansons] de mon enfance, quand nous chantions ensemble en famille, et c’est ce qui m’a inspiré au départ pour ce projet », dit McCartney. « J’ai dit à Tom ‘jetons un œil à celles-là, c’est la période que je veux couvrir’ » De son côté, Tommy en a suggéré d’autres, Nancy Jeffries, qui travaille dans mes buraeux et qui s’y connait bien, en a suggéré d’autres ; et même Diana a eu l’idée de quelques chansons. Puis j’ai joué quelques morceaux que j’avais écrits, et il me dit 'C’est une très bonne idée'. Alors nous en avons sélectionné deux. Nous nous y sommes tous mis, nous avons tous fait des suggestions et nous sommes tous arrivés au studio avec ces bagages. »
En plus des deux nouvelles compositions, My Valentine et Only our hearts (qui se fondent parfaitement bien dans la sélection des chansons), on trouve des standards peu connus comme More I cannot wish, un petit bijou signé Frank Loesser tiré de Guys & Dolls ; Always, d’Irving Berlin ; et une version attendrissante de the inch worm de Loesser. Même certaines des chansons qui nous sont plus familières comme Ac-cent-tchu-ate the positive et Bye bye Blackbird sont interprétées de façon fraîche et inspirée – cette dernière , chantée comme une ballade, devient une chanson dont l’atmosphère éclaire d’un jour nouveau les paroles de Mort Dixon. « Nous nous sommes dit ‘et si on en faisait une ballade’. Et soudain, vous écoutez l’histoire de manière totalement différente que lorsque le rythme est rapide. » dit LiPuma.
Au-delà de la présence de McCartney, des stars sont invitées et apportent une valeur ajoutée à l’album, comme Eric Clapton qui fait une sublime apparition sur les deux arrangements les plus bluesy du disque, My Valentine etGet yourself another fool, ainsi que Stevie Wonder qui joue une partition d’harmonica extrèmement efficace sur le dernier titre, Only our hearts.
Les autres stars sont Diana Krall et tous les autres musiciens de l’album, y compris John & Bucky Pizzarelli et leur élégant son de guitare. L’idée de faire appel à Krall est une clé qui permet d’appréhender l’alchimie considérable qui se dégage du projet. « C’est une pianiste qui maîtrise à merveille le ‘stride’, et c’est une des seules que je connaisse qui comprend le style de l’époque », dit LiPuma.
L’enregistrement débuta en mars 2010, d’abord aux Studio Capitol de Los Angeles, puis aux Studios Avatar de New York. L’approche était détendue, et les décisions concernant les arrangements étaient prises sur le vif. L’ambiance était détentue et sous le signe de la bonne humeur, et cela s’entend, car l’album donne vraiment l’impression que l’on passe une heure dans un club de jazz à la lumière tamisée.
« Chaque jour, j’arrivais [au studio] et on se disait 'Ok, qu’est-ce qu’on essaie aujourd’hui ? Qu’as-tu envie de faire ?' Et je répondais ' pourquoi pas celle-là ?' Et de là on travaillait les partitions », se souvient McCartney. "Rien n’était écrit par avance, on répétait le morceau. Alors que j’avais vu comment je voulais interpréter une chanson, Diana et les autres avaient décidé d’un arrangement, et on en débattait entre nous. On se disait 'C’est une bonne idée, essayons la', puis on faisait une prise ou deux qu’Al [Schmitt] enregistrait. Puis on allait l’écouter. C’était une manière de faire très agréable. »
LiPuma a un souvenir identique des sessions, et ajoute que pour une grande partie, rien n’était arrangé à l’avance. « On demandait à quelqu’un d’écrire les accords pour nous, puis on entrait en studio et on décidait de ce que nous allions faire, » dit-il. « En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, les choses commençaient à prendre forme, et au moment où elles commençaient à avoir une bonne sonorité, je disais à Al Scmitt 'Allez, on enregistre', et là, la magie opérait"
Selon le producteur, McCartney connaissait bien ce procédé « Il m’en a parlé à plusieurs occasions ‘J’adore ça, a me rappelle la manière dont les Beatles travaillaient. John [Lennon] et moi écrivions une chanson, puis on réservait le studio à Abbey Road, et ni George Martin, ni George Harrison ou Ringo [Starr] ne savaient de quoi parlaient les chansons'. Ils les travaillaient là, dans les studios, » se souvient LiPuma. « Quand nous nous sommes retrouvés en studio pour la première fois, il était véritablement essentiel que Paul trouve son approche pour raconter les histoires. Je pense que Paul se sentait vraiment bien. Il s’est vraiment amusé à faire l’album. »
Selon LiPuma, une des choses les plus remarquables chez McCartney, c’est qu’ « il vous laisse faire votre travail. Personne n’essayait d’anticiper sur ce que l’autre allait faire. Pour lui, deux choses importaient : est-ce que c’est agréable ? Est-ce qu’on s’amuse bien ?
Et, apparemment, c’était les deux. « C’était un travail fait avec beaucoup de plaisir », dit McCartney « Nous nous sommes tout simplement amusés, et avons apprécié la compagnie des uns et des autres. Nous formions une bonne équipe et je crois que le résultat n’est pas mal. »
Sans aucun doute, une des éléments fondamentaux qui va attirer l’attention du public sur ce nouveau projet est la présence des deux nouvelles compositions de McCartney. Les chansons sont d’une telle qualité qu’on ne peut que se poser la question : combien de trésors de même qualité, au juste, le compositeur de talent a-t-il encore de côté ?
« J’ai pas mal de choses, en effet – oui, pas mal de chansons que j’ai écrites au cours des deux dernières années, dit-il. « Je suis maintenant en train de réfléchir à l’élaboration d’un album de ces chansons. J’adore écrire. Les chansons me viennent naturellement. »
En fait, McCartney explique que, professionnellement, c’est de ses chansons qu’il est le plus fier : « J’ai vraiment beaucoup de chance : à chaque fois que nous faisons une tournée, nous avons quelques morceaux que nous pouvons jouer, dit-il, en minimisant la réalité. « Quand on y pense, l’écriture n’est pas toujours une chose que tu apprends. John et moi, n’avons pas appris. Nous nous sommes débrouillés tous seuls et avons fait notre propre apprentissage. Tout compte fait, on a fait des choses assez bonnes »
Et le public veut encore entendre ces ‘choses’ en concert, de même que des dizaines d’autres chansons de l’époque de Wings ou de sa carrière solo. Au cours des dix dernières années, McCartney a abordé ses tournées avec des répercussions stupéfiantes sur le box office. Depuis 2002, il a vendu 2.5 millions de places pour 135 concerts qui ont engrangé 322.6 millions de dollars [244.7 millions d’euros]. Barrie Marshall est le directeur de Marshall-Arts, agence basée à Londres et est le directeur des tournées mondiales de McCartney depuis des années. Marshall Arts est affilié à AEG Live, mais McCartney travaille aussi avec Live Nation pour l’Amérique du Nord et d’autres promoteurs dans le monde.
Aujourd’hui, l’excellent groupe qui l’entoure lors de ses tournées travaille avec lui depuis plus longtemps que les Wings ou les Beatles en leurs temps. « Ils sont super, vous ne trouvez-pas ? » répond-il quand on complimente le groupe « nous nous amusons vraiment beaucoup, et l’année dernière nous avons joué pas mal de dates. C’est un tel plaisir d’être sur scène avec eux. Nous nous entendons très bien, et apprécions les talents musicaux de chacun. Le mois prochain, cela fera dix ans que nous jouons ensemble. C’est assez long pour qu’on se considère comme un groupe à part entière. »
Quand on lui demande s’il continuera à travailler avec ce même groupe en tournée, McCartney répond « Oui, je l’espère. On adore tous la scène, et je ne vois aucune raison pour que ça ne se fasse pas. Je dois bientôt rencontrer mon promoteur qui, parait-il, a quelques idées intéressantes et sympathiques à me proposer. Donc, on va commencer à mettre tout ça en place et organiser les dates de concerts cette année.
Quant à l’éventualité de concerts avec les musiciens de Kisses, McCartney ne l’exclut pas. « Nous n’en avons pas encore parlé », dit-il. Le groupe doit jouer quelques dates à Los Angeles pendant la semaine de Grammy et McCartney doit recevoir le prix « Musicares’ Person of the year », ce qui peut vouloir dire quelques autres performances live. « Nous ferons quelques essais à ce moment-là et je crois qu’on y verra plus clair », dit-il. « De nombreuses personnes ont beaucoup d’idées et de suggestions à faire. J’aimerais voir ce que ça donne en live, si on prend plaisir à le faire. Si c’est le cas, alors il faudra envisager de l’emmener en tournée. »
Paul est une des pierres angulaires de ce qui fut indiscutablement le groupe rock le plus déterminant de tous les temps, auteur et co-auteur de chansons qui figurent parmi les œuvres éternelles et, tout simplement, les meilleures jamais écrites ; il a fait des tournées à l’époque de la Beatlemania, de même qu’avec deux excellentes formations de Wings et son groupe actuel. Il a reçu toutes les récompenses possibles et imaginables, et a même été anobli par la Reine Elizabeth II.
Mais c’est peut-être son sens de l’humour et sa capacité à ne pas se prendre au sérieux qui permettent à McCartney de rester dans le cœur du public, génération après génération, une idée qu’il ne nie pas « On peut dire que c’est de l’humour, sans oublier que j’aime profondément ce que je fais, » dit McCartney « Je suis un dingue de musique, mon vieux »
If music be the food of love, play on.
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