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Avec l'autorisation et la supervision de son auteur (merci Luca), je vous propose ici la traduction de son article paru ici sur le BeatlebrunchClub (lien dans le post précédent)

 

Enjoy!

Ram – L’album le plus important de Paul McCartney

Par Luca Perasi, auteur de Paul McCartney : Recording sessions (1969-2013)

    D’un point de vue musical, mais également psychologique, Ram représente une étape unique dans le parcours personnel de Paul McCartney ainsi que dans sa carrière solo.

   Il rompit la glace avec McCartney, c’est vrai. Mais Ram fut vraiment le premier album qu’il enregistra après la séparation des Beatles. C’est un aspect essentiel à prendre en considération quand on essaie de comprendre la musique ainsi que le sens de cet album pour Paul.

   Quand Paul et Linda se rendirent à New York au début du mois d’Octobre 1970, McCartney se remettait tout doucement d’un état dépressif. Il déclara qu’après la séparation des Beatles, il se sentit comme au chômage. Il se mit à trop boire, et c’est Linda qui le sauva de cet enfer, comme Paul l’avoua lui-même.

   Il se contenta de ne recruter que deux musiciens de la scène New Yorkaise, le batteur Denny Seiwell et le guitariste Dave Spinozza. Au bout d’une semaine les tensions montèrent et quand Spinozza quitta les sessions, Paul se montra très clair envers lui : il ne devait pas accepter d’autres sessions. Ce qu’il ne fit pas, et leurs chemins se séparèrent.

   Un des aspects qui transparaît de manière évidente dans cet album, c’est l’intensité avec laquelle McCartney chante certaines chansons. Cette explosion d’énergie se marie avec la rage : Monkberry Moon Delight, Too many people et Smile Away en sont de parfaits exemples. D’autres morceaux ont une atmosphère plus dramatique, comme Dear Boy. L’album regorge d’idées, parfois trop dans certains cas. La créativité et l’écriture montrent tout le talent de Paul McCartney. De nombreuses chansons – au corps défendant de McCartney lui-même – semblent s’adresser à John Lennon. La seule concession de Paul concerne Too many people. On pouvait lire dans les paroles originales : ‘Yoko took your lucky break’ [Yoko a saisi ta chance], un vers qui devint plus tard ‘you took your lucky break’ [tu as saisi ta chance]

   D’autres références sont subtiles. Dans Monkberry Moon Delight Paul semble parodier la manière de chanter de John dans le Plastic Ono Band, tandis que Three legs pourrait parfaitement passer pour une métaphore des Beatles en tant que groupe amputé d’un de ses membres. Dans Smile away, on peut lire des références vagues à ‘un de mes amis’.Dear Boy (que Paul décrit comme une chanson adressée à l’ex-mari de Linda) nous donne l’impression d’un nouveau ‘J’accuse’ à l’attention de John.

   Quand il écouta l’album, Lennon se mit en colère et déclara : ‘Toutes ces références au début de Ram comme ‘Too many people going underground’ [trop de gens passent dans l’ombre], et bien, c’est de nous, Yoko et moi, dont il parle. Et ‘You took your lucky break’, c’était comme s’il considérait que nous avions eu de la chance de nous retrouver avec lui.

   De son côté, Paul a toujours déclaré que ces mots ne visent personne en particulier. L’inspiration de Three legs lui vint d’un dessin que fit sa fille Heather. Mais après avoir écouté l’album, il reste un goût amer, surtout quand on le replace dans son contexte.

   Revenons à la musique. Ram est, à lui tout seul, une encyclopédie de styles  et de genres dans la plus pure tradition McCartneysienne.

   Paul passe de rocks agressifs comme Too many people et Monkberry Moon Delight à de belles ballades (the back seat of my car, qui mèle un orchestre de cuivres et des cordes romantiques), en passant par des chansons imitant le style du chanteur/joueur de ukulele George Formby (Ram on), des mini-opéras (Uncle Albert/Admiral Halsey et Long-haired lady, construites à partir de sections, tempos, mélodies et atmosphères différents). Il y a aussi le style country (Heart of the country, avec un mélange parfait de guitare solo et de scat chanté par Paul) et un blues (Three legs)

   Et n’oublions pas que George Martin s’est chargé des arrangements des parties de l’orchestre, même s’il n’était pas présent dans le studio.

   En résumé, Ram représente un sommet dans la carrière créative de McCartney. C’est aussi le reflet de moments différents de la vie professionnelle et personnelle de Paul. Vous avez essayé, vous n’avez pas abandonné, même en pleine tempête. Vous avez réussi, Paul.