Paul McCartney vient de publier son nouvel album tant attendu par ses fans. Ces derniers jours, il s’est confié à plusieurs journalistes pour parler de cet opus particulier. Nous avons compilé une synthèse de ces entretiens, réalisés pour la plupart en anglais, pour permettre à tous de mieux appréhender cette oeuvre.
Confinement
En mars, j’étais confiné et j’ai commencé à peaufiner des chansons et d’autres choses en pensant que c’était pour mon plaisir personnel. Puis, j’ai eu rapidement onze ou douze titres et c’était comme : « Oh, ce serait probablement un album. » Le fait que je n’avais pas considéré que je le faisais, ça a rendu les choses meilleures et plus fun.
J’ai cherché la dernière chanson que j’avais écrite et j’ai fait ça. J’ai réalisé qu’il y avait certaines chansons à moitié travaillées, donc j’ai commencé à les finir. Et puis il y avait celles que je n’avais jamais touchées, que j’avais écrites il y a un an à peu près, et j’ai aimé revenir à ces chansons, parce que ce n’était pas pour rien. Et ça sentait le fait-maison.
J’étais dans le Sussex, avec Mary et sa famille, pendant le confinement. Mary est une grande cuisinière et j’attendais toujours un plat succulent. Les enfants jouaient dans la pièce et l’un d’eux me demandait : « Qu’as-tu fait en studio aujourd’hui ? ». Je sortais mon téléphone, je le connectais à une enceinte et je leur jouait le morceau. Donc, ils ont eu le nouvel album en avant-première, au jour le jour. C’était plus amusant. Comme si je ne le faisais que pour eux.
J’ai la chance d’avoir un studio à vingt minutes de chez moi. Je n’avais qu’à m’y rendre avec mon ingénieur du son, Steve, et Keith qui se charge de mon matériel. On était très prudents, on gardait nos distances. On a fait le disque à trois.
Long Tailed Winter Bird
J’avais commencé un projet avec Geoff Dunbar qui avait réalisé un court-métrage d’animation. Il m’a demandé si je pouvais composer un instrumental pour les génériques de début et de fin. Je suis allé en studio pendant une demi-heure et j’ai conçu cela rapidement. Puis, j’ai continué à jouer et ça a donné « Long Tailed Winter Bird ».
Find My Way
J’avais trouvé facilement le refrain : « Well, I can find my way, I know my left from right Because we never close, I’m open day and night ». C’était très encourageant pour la suite. Après, j’avais un truc un peu foireux. L’idée d’aller en vacances avec quelqu’un. Ça n’a pas marché et elle est partie. C’était nul ! Ensuite, je l’ai reprise et c’était meilleur.
Pretty Boys
C’est au sujet de mannequins hommes qui poursuivaient un photographe renommé en justice parce qu’il avait été trop entreprenant pendant les sessions. Je ne sais pas à quel point, mais j’ai assisté à quelques shootings et le photographe peut rapidement devenir fou. Quand je me baladais dans une rue de New York, j’ai vu une grande file de vélos à louer et j’ai pensé que c’était une bonne idée : « Here come the pretty boys, objects of desire, a line of bicycles for hire. » L’idée de ces modèles hommes à louer.
The Kiss Of Venus
C’est un ami qui m’a passé un bouquin un peu hippie, tout à fait fascinant parce que ça parle des mouvements des planètes. La Terre, Vénus, Mars, la Lune… Et dans le livre, on voit que si on suit les orbites de ces planètes sur la durée, cela donne des trajectoires tout à fait fascinantes. Il y en a en forme de fleur de lotus et c’est quelque chose d’un peu magique. Ce bouquin m’a passionné et je le lisais quand j’ai commencé la chanson. Je parcourais le livre pour y trouver des idées et je suis tombé sur l’expression « Le baiser de Vénus ». C’est le moment où la Terre se rapproche le plus de Vénus. J’ai trouvé que c’était une bonne idée de chanson. C’était intéressant parce que je l’ai jouée directement à la guitare acoustique et j’étais heureux de la façon dont elle a évolué.
Lavatory Lil’
C’est une chanson qui parle des gens qu’on n’aime pas, avec lesquelles on ne s’entend pas. Dans nos vies, on a rencontré des gens comme ça. Ce titre ne parle pas d’une personne en particulier. C’est un personnage fictif, mais j’aime bien cette idée de quelqu’un qu’on appelle la « Lil’ des sanitaires ». Ça me fait penser à une chanson de John, « Polythene Pam ». Je suis parti d’une demi idée d’un personnage et à partir de là, j’ai créé une autre fiction.
Seize The Day
Sur ce disque, j’écrivais une chanson et, soudain, ça s’est mis à sonner très Beatles. Je me suis demandé : « Ne devrais-je pas suivre ce chemin ? Ça va être trop Beatles ! » Et tu dis : « Ecoute, compose simplement ! » Et cette chanson, c’est « Seize The Day ». Ça fait très Beatles, mais les Beatles n’existent plus.
Women And Wives
Je l’ai écrite quand j’étais à Los Angeles. Je venais de finir le livre consacré à l’artiste de blues Lead Belly. J’étais dans une humeur bluesy et je jouais quelques accords simples au piano. J’ai commencé et c’était du blues. C’est probablement ma chanson préférée. Sur celle-ci, je joue avec la contrebasse de Bill Black, le musicien d’Elvis Presley.
Slidin’
Slidin’ est née pendant un soundcheck à Dusseldorf. J’ai commencé à jammer et ce riff est arrivé. Je l’ai aimé et on l’a développé. Je me suis dit que je devais en faire quelque chose. On l’a enregistré avec le groupe pour Egypt Station, mais ça n’allait pas. Ce n’était pas abouti. J’ai changé quelques trucs, j’ai ajouté des paroles et c’est devenu cela.
Deep Down
C’était juste une jam. J’avais un rythme et des accords que j’aimais, mais pas trop d’idée. Mais j’avais ce truc : « Get deep down, wanna get deep down. » Je ne sais pas trop ce que j’entends par « Deep Down », sauf que je veux une relation profonde avec une personne. Il y a des chansons, tu ne sais pas trop où tu vas. Tu as une moitié d’idée et tu apprécies juste le groove et, pour celle-ci, c’était vraiment ça. Je pensais à des idées au fur et à mesure.
Deep Deep Feeling
C’est l’une des chansons que j’avais commencée l’an dernier et dont je me disais que je pourrais l’améliorer si j’avais la chance d’aller au studio et d’en faire quelque chose. Sur ce morceau, j’étais fasciné par cette idée de ce sentiment très profond quand tu aimes quelqu’un si fort que cela te fait presque du mal. C’était le point de départ, mais après l’avoir commencé, je me suis dit que ce ne serait certainement pas un single de trois minutes. Je ne voulais pas que ça s’arrête, je souhaitais que ça continue pour toujours. Il y avait des passages qui me paraissaient ennuyeux, alors je leur injectais un solo de guitare, des boucles audio ou du mellotron. Puis, j’ai pensé que je devais en couper une partie et, au moment de le faire, je l’ai réécoutée et j’ai pensé : « Tu sais quoi ? J’aime ça, je ne vais pas y toucher.»
Pochette
Je me suis dit : « Si ça doit s’appeler « McCartney III », on peut juste avoir un 3 normal, ou en chiffres romains. Mais comment symboliser le 3 ? ». Et j’ai pensé au dé et c’était assez cool. Puis, cette idée que ce serait un vrai dé qui serait en diagonal. Et je voulais juste noter « McCartney » et avoir le dé. J’ai contacté mon ami Ed Ruscha, un grand artiste et sa spécialité ce sont les caractères. Et il a créé celui-ci pour moi.
Dernier disque ?
Tout ce que je fais est supposé être le dernier. Quand j’ai eu 50 ans – « C’est sa dernière tournée » et c’était : « Vraiment ? Oh, je n’aime pas ça. » C’est toujours la rumeur qui tourne, mais ça va. Quand on a fait « Abbey Road », j’étais mort, alors le reste c’est du bonus.
Compilé par Dominique Grandfils pour Maccaclub (sources : BBC 2, NBC, NME, France Inter, Rolling Stone)